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Un enseignant peut-il dévoiler ses convictions religieuses ?
En Belgique comme dans d’autres pays, les enseignant·es sont tenu·es à un devoir de neutralité, dont les implications sont cependant sujettes à débats. Ce devoir de neutralité interdit certainement la propagande (politique ou religieuse) en classe. Mais que devrions-nous penser du port de signes trahissant une appartenance religieuse particulière, comme un hijab, une croix apparente ou une kippa ? Peut-on considérer cela comme de la propagande ? Certains signes sont-ils plus acceptables que d’autres ? Quelles seraient les implications d’une interdiction pour les enseignant·es concerné·es ? Quels messages enverraient respectivement une telle interdiction ou une autorisation des signes religieux ? Avec quelles conséquences pour la société ?
Ressources :
- Jeffrey, D. (2013). « Laïcité, voile musulman et neutralité éthique », Formation et profession, 21(2), 114-118.
- Xavier Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en communauté française« .
- Philoxime, « Les profs doivent-ils cacher leurs opinions ? » (vidéo)
Un journaliste d’un média public peut-il dévoiler ses convictions politiques ?
En janvier 2018, un journaliste d’une radio publique belge a été écarté après avoir envoyé un e-mail à ses contacts, à partir de son adresse professionnelle, dénonçant la politique migratoire du gouvernement en place. Les journalistes de médias publics sont en effet tenus à un certain devoir de neutralité, au moins dans l’exercice de leur fonction ou dans le cadre professionnel. Au-delà du cas précis de ce journaliste, que penser d’une telle interdiction de dévoiler ses convictions politiques ?
La question empirique est celle de l’influence que peut avoir sur le grand public le dévoilement de ses convictions par un journaliste (populaire). D’un point de vue normatif, on peut notamment se poser les questions suivantes : Devrions-nous faire une différence de traitement entre convictions religieuses et politiques ? N’est-il pas préférable du point de vue de la transparence qu’on connaisse les convictions politiques des journalistes ? L’interdiction n’encourage-t-elle pas où une forme de manipulation plus insidieuse ? Au contraire, autoriser à dévoiler ses convictions encouragerait-il un militantisme décomplexé au détriment de l’objectivité ?
Ressource :
http://www.philomedia.be/eddy-caekelberghs-ou-le-tabou-des-preferences-politiques-des-journalistes/
Les journalistes doivent-ils donner la parole à l’extrême droite ?
En mars 2020, le magazine politique belge Wilfried a proposé un entretien avec le leader du Vlaams Belang, parti d’extrême-droite flamand, dérogeant à une convention prévalant jusqu’alors dans les médias belges francophones et consistant à ne pas donner directement la parole à des représentant.e.s de l’extrême droite (« cordon médiatique »). Pour sa défense, la magazine a invoqué sa volonté de faire comprendre à ses lecteurs le discours de ce parti, qui était alors crédité de plus de 25% d’intentions de vote. Le slogan du magazine est d’ailleurs « Comprendre, ne pas juger ». Cette décision, qui a pu paraître opportuniste à certains, en raison de son potentiel commercial (booster les ventes), est-elle éthiquement condamnable ?
Questions empiriques : Quels sont les effets du cordon médiatique sur la popularité de l’extrême droite ? Sur le sentiment de victimisation de ses partisan.e.s ? Y a-t-il des raisons empiriques de penser que la rupture du cordon médiatique a de bonnes chances d’entraîner la rupture du cordon sanitaire (exclusion politique de l’extrême droite) ?
Questions normatives : Les médias doivent-ils donner la parole à toutes les opinions suffisamment répandues dans la société ? Doivent-ils agir différemment dans le cas de l’extrême droite ? De l’extrême droite uniquement ? Quelles sont les positions idéologiques qu’un média ne peut en aucun cas relayer (s’il y en a) ? Quelles sont les pratiques légitimes et illégitimes quand les médias traitent de ces sujets (reportage, interview, analyse critique) ? Les conséquences sur la popularité de l’extrême droite ou sur sa compréhension sont-elles les seules à prendre en compte ? Faut-il prendre en considération également la manière dont ces discours sont vécus par celles et ceux qui en sont victimes ? Est-ce un privilège de blancs de suspendre le jugement sur ces questions ? Le fait que le parti en question aitc polissé son discours doit-il changer quelque chose dans notre évaluation ?
Ressources :
- https://www.levif.be/belgique/wilfried-brise-le-cordon-sanitaire-et-donne-la-parole-a-tom-van-grieken/
- https://wilfriedmag.be/a-propos/cordon-mediatique/ (La défense du magazine suite à la polémique)
- Une réponse de Nabil Sheikh Hassan, chercheur à l’UCLouvain
- Philoxime, « L’extrême-droite, c’est quoi ? » (vidéo)
Confession de pédophilie
Un prêtre qui apprend lors d’une confession qu’un de ses confrères pratique la pédophilie devrait-il le dénoncer à la police ?
Questions empiriques : Les prêtres sont-ils tenus au secret professionnel dans le cadre des confessions ? Y a-t-il éventuellement des exceptions à ce devoir de secret ?
Questions normatives : même si les prêtres sont tenus au secret, est-ce une bonne chose ? Faudrait-il leur imposer un devoir de dénoncer les crimes ? Tous les crimes ou seulement les plus graves ? Faut-il sanctionner ceux qui ne le font pas ? Soumettre à un interrogatoire ceux qui sont soupçonnés de cacher des faits ? Serait-ce un manque de respect envers une religion ? Envers des personnes ? Est-ce contraire à la liberté de culte ? Si c’est le cas, est-ce suffisant pour considérer que le secret est légitime ?
Ressources (sur un cas légèrement différent) :
Faut-il dénoncer ses collègues ?
Dans le cadre professionnel, il peut arriver d’être témoin d’infractions de la loi (ou d’un code de déontologie propre à la profession) de la part de collègues. Dans un tel cas, est-il toujours moralement requis de dénoncer l’infraction, quitte à briser une relation de confiance avec un·e collègue ? Est-il suffisant de suggérer à la personne fautive de ne plus recommencer ? Cela dépend-il du contexte ? Si oui, pourquoi ?
Questions empiriques : Quel peut être l’impact d’une dénonciation sur la relation entre collègues, voire sur l’ambiance dans l’entreprise ? Quelles sont les conséquences de l’infraction ? Est-ce une infraction volontaire ou involontaire ? Motivée par un intérêt privé ou publiquement justifiable ?
Questions normatives : Ce qui est interdit est-il toujours injuste ? Faut-il obéir aux règles en toutes circonstances ? Qu’est-ce qui peut justifier moralement une atteinte aux lois ou à des règles déontologiques ? La loyauté est-elle plus importante que la légalité ? L’absence de dénonciation nous rend-elle complice de l’infraction, ou moralement responsable d’infractions futures ?questions éthiques.)