Le Titanic
Le naufrage du Titanic fait désormais partie de l’imaginaire collectif. Lors de celui-ci, il n’y avait pas suffisamment de canots de sauvetage pour sauver tous les passagers. Deux règles de priorité ont alors été établies : 1) les femmes et les enfants d’abord ; 2) les passagers de première classe avant les autres. Ces règles de priorité sont-elles adéquates d’un point de vue éthique ?
Questions normatives : pourquoi les femmes et enfants devraient-ils avoir priorité sur les hommes ? Cela n’est-il pas contraire à l’égalité des chances (de survie) ? Ne faudrait-il pas plutôt attribuer aléatoirement les places dans les canots de sauvetage ? Ou plutôt donner priorité aux plus jeunes, à ceux qui ont le plus d’années de vie saine devant eux ? Et si les passagers de première classe ont payé plus cher, n’ont-ils pas droit à un meilleur traitement ? Imaginons que le billet de première classe inclue une assurance de priorité en cas d’accident, serait-ce acceptable ?
NB : il peut être utile d’ensuite transposer les conclusions de cet exercice au cas de l’allocation d’organes. Les règles doivent-elles être les mêmes ? Pourquoi ? Pourquoi pas ? En quoi le cas est-il différent ?
Prises d’otage
Les prises d’otage avec demande de rançon génèrent le plus souvent un dilemme tragique : faut-il payer la rançon quitte à inciter ce genre de pratique ou ne céder à aucun prix quitte à sacrifier une ou des vies humaines ?
Questions empiriques : quel est l’impact réel des paiements de rançons sur les taux de prises d’otage ? Est-il possible de payer une rançon sans que cela se sache ?
Questions normatives : peut-on sacrifier une vie humaine en vue de décourager cette pratique ? Pour des raisons budgétaires ? Pour des raisons de principe ? Cela change-t-il quelque chose s’il y a plusieurs otages ? À partir de quel nombre aurions-nous un point de vue différent ? Y a-t-il des montants de rançon acceptables et d’autres inacceptables ?
L’affaire Treblinka
Dans les camps d’extermination nazis, les Sonderkommandos (SK) désignaient des groupes de prisonniers chargés de tâches d’administration du camp, y compris d’assistance à l’extermination d’autres prisonniers. L’ « affaire Treblinka » éclate en 1966, lors de la parution de l’ouvrage éponyme de Jean-François Steiner. Steiner décrit la participation des SK au génocide dans le camp de la mort de Treblinka, mais pas pour les condamner : l’argumentation de Steiner vise à montrer, entre autre, que leur amour de la vie était en fait un acte de résistance, leur survie étant la condition non seulement de la préservation de la religion juive, mais aussi de la possibilité de témoigner de « ce que l’homme est capable de faire à l’homme ». Certains jugent cependant ces faits comme moralement condamnables, malgré les circonstances exceptionnelles qui étaient celles des camps. Primo Levi lui-même a toujours balancé entre le refus de juger les rescapés et l’impossibilité de ne pas condamner leurs actes. Piour J.-M. Chaumont, par exemple, on peut juger la participation des SK au génocide comme immorale tout en admettant qu’on n’aurait pas fait mieux qu’eux et que de telles circonstances sont proches d’annihiler notre liberté morale. D’autres estiment toutefois que ces circonstances annihilent ou modifient radicalement notre responsabilité morale.
Réfléchir rétrospectivement à une situation extrême comme celle-là, au-delà d’un certain dégoût que cela peut inspirer, peut être utile dans l’hypothèse où des situations extrêmes devaient un jour se présenter à nouveau à nous. En effet, on y réfléchit plus aisément quand on n’est pas dans le feu de l’action.
Ressources :
Ce cas s’inspire directement de Jean-Michel Chaumont, Survivre à tout prix ? Essai sur l’honneur, la résistance et le salut de nos âmes, Paris, La Découverte, 2017.
Voir également Jean-François Steiner, Treblinka : La révolte d’un camp d’extermination, Paris, Fayard, 1994 [1966].
Ainsi que le film Shoah, de Claude Lanzmann.